Nigeria, 1958
« Je suis profondément attaché au Nigeria. Je l’ai dans le sang, si je puis dire », déclare Peter Paris, décrivant son attachement profond à un pays qu’il a connu il y a 50 ans en tant que premier Carrefouriste canadien.
Maintenant professeur émérite au Princeton Theological Seminary, Peter Paris est allé au Nigeria en 1958 avec Operations Crossroads Africa, l’organisation américaine qui est à l’origine de Carrefour Canadien International. Ce voyage était une première sur plusieurs plans : premier mandat de Crossroads en Afrique; un des premiers efforts de volontariat outre-mer en Amérique du Nord; et premier voyage de M. Paris dans la mère patrie de ses ancêtres.
Pour des raisons que M. Paris ignore toujours, le projet de travail de Crossroads au Nigeria en 1958 n’a pas pu avoir lieu. Mais les choses ont quand même bien tourné et se sont révélées « extrêmement bénéfiques » pour le jeune homme de 25 ans. Les Carrefouristes ont plutôt pris part à un voyage d’étude dans le pays avec des étudiants nigérians. « Nous avons en somme partagé notre culture les uns avec les autres, ce fut un échange culturel », dit-il. Ce séjour a permis à M. Paris de réaliser un rêve d’enfance, celui de découvrir la terre de ses ancêtres africains. Il se rappelle la surprise qu’il avait éprouvée de se retrouver au sein d’une majorité pour la première fois.
« Je n’aurais pu imaginer qu’il y avait autant de personnes noires dans l’univers entier, raconte M. Paris en riant. Quel contraste de voir les blancs se retrouver en minorité pour la première fois! Et quel contraste bienfaisant pour moi, Afro-Canadien! »
Le Nigeria était sur le point de s’affranchir du colonialisme. Il allait accéder à l’indépendance en 1960. Durant leur voyage dans le pays en compagnie de leurs nouveaux amis nigérians, les Carrefouristes ont rencontré des universitaires et des dirigeants gouvernementaux qui étaient profondément engagés envers l’indépendance de leur pays. Pour M. Paris, le colonialisme prenait une tout autre dimension. Il avait été éduqué dans l’acceptation inconditionnelle du colonialisme.
« Crossroads Africa m’a donné énormément d’information au sujet de ce très complexe pays, sur l’Afrique en général et, plus particulièrement, sur la nature du colonialisme, que mon éducation au Canada ne m’avait pas permis de saisir entièrement, se rappelle M. Paris. La notion du colonialisme qui nous avait été inculquée était très univoque, pratiquement comme si c’était l’Institution de bienfaisance pour les peuples africains. Mais une fois en Afrique, à écouter les Africains parler d’eux-mêmes, on avait une perception radicalement différente du colonialisme. »
Les discussions stimulantes et les nouvelles amitiés ont profondément marqué le jeune homme de 25 ans. Le théologien décrit cette expérience intense en terme spirituel.
« Ce fut une expérience révélatrice, pour employer une expression théologique, explique M. Paris. Une expérience révélatrice nous amène à avoir un regard neuf sur ce que nous avons fait ou pensé jusqu’à ce moment-là, à une prise de conscience qui ouvre de toutes nouvelles perspectives. C’est ce qui s’est passé pour moi au Nigeria. »
M. Paris est retourné au Nigeria trois ans plus tard. Il a travaillé durant plusieurs années avec le Mouvement des étudiants chrétiens du Nigeria. L’Afrique continue d’être au cœur de ses visées intellectuelles et spirituelles. Il a écrit de nombreux ouvrages et prononcé plusieurs allocutions sur la spiritualité des peuples africains sur le continent et dans la diaspora.